Professions insolites : Valérie Halin, Rotary Club Liège-Sud

Afin de lancer notre série sur les professions insolites au Rotary, nous reproduisons des extraits d’un article du numéro de janvier 2023 de Rotary Contact signé Denis Crepin.

Valérie Halin est calligraphe. Certains de nos lecteurs et lectrices seront peut-être surpris de constater que cette profession existe encore. En effet, pourquoi faire appel à un calligraphe alors que n’importe quel traitement de texte peut reproduire une infinité de polices de caractère ? Loin de la froideur du lettrage automatique, Valérie évoque avec passion son métier et la spontanéité, la vie et la chaleur qu’apportent ses réalisations.

Qu’est-ce qui vous a donné envie de vous diriger vers la ‘belle écriture’ ?

Mes parents possédaient une entreprise familiale et, déjà à quatre ans, j’adorais observer le travail de l’employé qui traçait les textes en écriture technologique – il n’y avait pas encore d’ordinateurs dans les entreprises, à cette époque. Je trouvais cela tellement beau, tellement parfait que je me suis rapidement mise à l’imiter. Ou plutôt à essayer de l’imiter car à cet âge, je n’avais évidemment pas encore la psychomotricité requise. Donc, j’ai assez rapidement abandonné.

Beaucoup plus tard, j’ai renoué et me suis découvert une véritable passion. J’ai alors enchaîné les rencontres et les stages afin d’affiner ma technique. On peut d’ailleurs parler de formation en continu car la recherche du trait parfait est perpétuelle et, par essence, inassouvie. Actuellement, je suis des cours par vidéoconférence avec un calligraphe américain que je rêvais de rencontrer depuis des années. J’exerce ma profession depuis une vingtaine d’années. Au départ, en activité complémentaire ; aujourd’hui, elle est ma seule source de revenus.

Travaillez-vous toujours de la même façon, que ce soit pour vous ou pour le public ?

Non. Le public veut pouvoir lire quelque chose, il cherche un message écrit, une pensée profonde. Moi, mon dada, c’est de partir d’un texte et de m’en éloigner le plus possible jusqu’à arriver à la limite de la lisibilité, voire toucher à l’abstraction. On est plus dans la recherche esthétique, dans un long cheminement vers l’abstraction que dans la volonté de faire passer un message. Entre la matière première, la lettre, et le produit fini, il y a tout un parcours que je ne pourrais jamais franchir sans ma formation de calligraphe.

À propos, quel type de clientèle avez-vous ?

Des particuliers, quelquefois, mais aussi et surtout des entreprises issues de l’industrie du (grand) luxe. Il ne faut pas croire que tout ce qui concerne l’aspect visuel et le packaging se fait forcément par ordinateur. Pour véhiculer leur image, les firmes sont à la recherche d’une certaine forme de spontanéité et d’entrain qu’elles retrouvent plus facilement dans le travail d’un calligraphe que dans le lettrage parfait et régulier fourni par un programme informatique. Le client, en voyant inconsciemment les petites ‘imperfections’ du travail (les lettres ne seront jamais exactement identiques), se rend compte de son côté humain, artisanal et il comprend qu’il n’a pas été exécuté froidement par une machine. La seule retouche numérique que je m’autorise, c’est un nettoyage des petites taches et bavures lorsque mon travail doit être agrandi pour figurer sur un large support tel que drapeau, boîte, sac, etc.

Quelle fut votre commande la plus originale ?

Un jour, une mère et son fils sont venus chez moi. Ils avaient un texte à me faire recopier de ma plus belle écriture. En fait, il s’agissait d’une lettre de rupture que le fils devait remettre à son amie à la Saint-Valentin… Sinon, sur un ton beaucoup plus positif et même touchant, j’ai eu un papa qui m’a demandé d’écrire une belle lettre, signée du père Noël, qu’il avait l’intention de donner à sa fille. Inutile de dire que ce genre de commande est beaucoup plus facile à honorer que la première.

Pourquoi avez-vous rejoint le Rotary ?

Avant tout par volonté d’agir au profit d’autrui. J’avais envie de m’engager concrètement plutôt que de faire des dons à des associations dont la ‘cuisine intérieure’ m’échappe totalement. Ici, je peux donner de mon temps et voir les résultats. Dernièrement, le club a décidé de proposer à la vente un calendrier 2023 dont les bénéfices serviront à alimenter nos actions. Les images de ce calendrier sont des reproductions de mes travaux.

Malheureusement, et c’est hélas une constatation que l’on doit faire dans de nombreux clubs, nous avons du mal à recruter de nouveaux membres. Nous en connaissons tous les raisons, l’une des principales étant le manque de temps chez les jeunes. Sans vouloir absolument réinventer la roue rotarienne et faire table rase du passé, il faut quand même bien se rendre compte que notre manière de fonctionner doit être adaptée. L’une des pistes est de recruter des membres ‘virtuels’ qui auront le droit d’assister aux réunions exclusivement (ou en grande partie) à distance. Le plus important, ce n’est pas la présence physique mais bien les idées et la motivation à agir.

Enfin, nous devons continuer à nous battre contre ce déficit d’image qui nous colle à la peau. Trop souvent, le Rotary continue à être mal perçu. On nous voit comme un club de messieurs en cravate ou de snobs qui se réunissent autour d’un repas, et nos actions concrètes sont habituellement ignorées par les médias. Le Rotary est une organisation qui, aujourd’hui encore, cultive trop la discrétion. Faire le bien autour de soi, c’est bien, mais le faire savoir, c’est encore mieux.

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