Un film sur le combat des handicapés pour la dignité

Texte : Ben Lewin

Ma relation avec notre projet de film, Sylvia et le président, dépasse le cadre professionnel. Elle est profondément personnelle. J’ai fait partie de la « génération polio » qui a contracté le virus au début des années 50, juste avant l’avènement du vaccin Salk. Mon corps a été affecté à 80 % dans la phase aiguë, mais j’ai été progressivement rééduqué au point de pouvoir marcher avec des béquilles et d’atteindre un réel niveau d’indépendance physique.

Ben Lewin

L’indépendance économique, c’est autre chose. J’avais l’air très différent et les gens avaient souvent des préjugés sur mes limites physiques — voire mentales. Au cours de mes premières années d’études, on m’a enseigné la vannerie, en partant du principe que c’était avec ça, ou quelque chose de similaire, que j’aurais probablement une contribution à la société. Plus tard, on m’a refusé un emploi de bureau dans l’administration, au motif que j’étais un employé potentiellement à haut risque et à forte dépendance. La seule façon d’avancer dans ce labyrinthe déconcertant de préjugés sociaux était de s’affirmer.

Pendant la majeure partie de ma vie professionnelle, j’ai gagné ma vie en tant que cinéaste, mais cela n’a pas été facile. Même dans le monde ostensiblement libéral du cinéma, l’intégration des personnes handicapées est une prétention plus qu’une réalité. C’est un monde obsédé par l’image et l’apparence, dominé par les algorithmes commerciaux et les impératifs des actionnaires de Wall Street. Je suis actuellement le seul réalisateur en activité ayant un handicap visible au sein de la Directors Guild of America. Ça veut sûrement dire quelque chose.

L’histoire de Sylvia Flexer est celle de la première bataille historique pour la dignité des travailleurs handicapés et leur reconnaissance en tant que membres utiles de la société. C’est la même bataille qui est encore menée aujourd’hui. Si j’avais été là, à l’époque de Sylvia, de sa génération polio, j’aurais été membre de la Ligue des handicapés physiques, luttant à ses côtés.

Le fait que le mouvement en faveur des droits des personnes handicapées soit né dans les années 30 est peu connu en dehors des articles universitaires et de journaux contemporains. On connaît encore moins la cruelle ironie du fait qu’à cette époque, les travailleurs handicapés étaient victimes de discriminations de la part d’une administration dirigée par un président en fauteuil roulant, qui se donnait beaucoup de mal pour cacher au public américain la vérité sur son état de santé. Sylvia et ses compagnons protestataires ont largement contribué à pousser FDR à prendre davantage conscience des droits des personnes handicapées, à fournir des emplois aux travailleurs handicapés dans le cadre du New Deal et, plus tard, à mettre sur pied March of Dimes qui, en fin de compte, a conduit à la mise au point du vaccin contre la polio.

Notre mission consiste désormais à créer un long métrage original et percutant (Sylvia et le président) qui mettra en lumière l’histoire de Sylvia et inspirera d’autres personnes grâce à son exemple. Nous disposons d’un scénario solide et avons choisi trois excellents acteurs handicapés pour les rôles principaux, dont la lauréate d’un Oscar, Marlee Matlin. Nous sommes convaincus qu’en transmettant ce message, nous nous trouvons sur un terrain d’entente avec le Rotary et nous espérons que cette campagne de sensibilisation donnera un élan à la production de ce film important.


S’informer sur les efforts du Rotary pour éradiquer la polio.

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